Le conseil d'état vient de rendre un arrêt particulièrement pédagogique
sur le sort d’un bail commercial conclu sur une dépendance du domaine public.
Il a tout d’abord rappelé « qu’en raison du caractère précaire et
personnel des titres d'occupation du domaine public et des droits qui sont
garantis au titulaire d'un bail commercial, un tel bail ne saurait être conclu
sur le domaine public ».
En conséquence, dans l’hypothèse où le gestionnaire du domaine public
conclut un tel bail sur une dépendance du domaine public ou laisse croire à
l'exploitant de ce bien qu'il bénéficie des garanties prévues par la
législation sur les baux commerciaux, elle commet une faute de nature à engager
sa responsabilité.
En pareil cas, et, sous réserve de ses propres fautes, l’exploitant
peut demander à être indemnisé de « l'ensemble des dépenses dont il
justifie qu'elles n'ont été exposées que dans la perspective d'une exploitation
dans le cadre d'un bail commercial ainsi que des préjudices commerciaux et, le
cas échéant, financiers qui résultent directement de la faute » commise
par le gestionnaire.
Dans l’hypothèse où le gestionnaire mettrait fin avant son terme au bail commercial et en l'absence de toute faute de l'exploitant, celui-ci devrait « être regardé, pour l'indemnisation des préjudices qu'il invoque, comme ayant été titulaire d'un contrat portant autorisation d'occupation du domaine public pour la durée du bail. »
A ce titre, il serait en droit, sauf double indemnisation, d'obtenir
réparation du « préjudice direct et certain résultant de la résiliation
unilatérale d'une telle convention avant son terme, tel que la perte des
bénéfices découlant d'une occupation conforme aux exigences de la protection du
domaine public et des dépenses exposées pour l'occupation normale du domaine,
qui auraient dû être couvertes au terme de cette occupation ».
En revanche, compte tenu du caractère révocable et personnel d'une autorisation d'occupation du domaine public, le juge considère que « celle-ci ne peut donner lieu à la constitution d'un fonds de commerce dont l'occupant serait propriétaire. »
Le conseil d'état se prononce enfin sur l’applicabilité de la loi du 18
juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises.
Celle-ci a introduit dans le code général de la propriété des personnes
publiques un article L. 2124-32-1, aux termes duquel « un fonds de
commerce peut être exploité sur le domaine public sous réserve de l'existence
d'une clientèle propre ».
Or, le conseil d'état estime que « dès lors que la loi n'en a pas
disposé autrement [ces dispositions] ne sont applicables qu'aux fonds de
commerce dont les exploitants occupent le domaine public en vertu de titres
délivrés à compter de son entrée en vigueur ».
Il en déduit que l'exploitant qui occupe le domaine public en vertu
d'un titre délivré avant cette date doit être regardé comme n’ayant jamais été
propriétaire d'un fonds de commerce, et ne peut donc prétendre à
l'indemnisation de la perte d'un tel fonds.
Source : Domaine public - Sort du bail commercial (conseil d'état, 24 novembre 2014, n°352402)